Voyage en Indonésie été 2017: épisode 2

Au cœur de la musique sundanaise :

le Tarawangsa

tarawangsa-sunda-rancakalong

Ce Jeudi 6 Juin 2017, nous avons eu la chance inestimable de rencontrer Pupung Supena, un grand maître du Tarawangsa, et Tahya son accompagnateur au jentreng.

En partant de Bandung, il nous a fallu environ une heure et demi pour arriver dans la région de Sumedang. Nous sommes passés par des paysages magnifiques avec des rivières en étages engorgées dans des vallées profondes. La région est encore très préservée et en arrivant dans le district de Rancakalong nous nous sentons comme enveloppés délicatement au cœur de la culture sundanaise.

Pupung Supena, nous a accueilli dans sa maison, le temps de nous jouer deux sublimes répertoires et de nous présenter brièvement ce style ancien. Il faudrait bien plus d'une page de blog pour expliquer en détail tous les aspects de ces instruments mais voici un petit résumé de notre très (trop) brève visite sur place.

Le Tarawangsa est un style de musique séculaire spécifique à la région de java-ouest (Sunda) qui daterait du 14e siècle. Il s'est transmis oralement et ce mode de transmission persiste jusqu'à aujourd'hui. C'est un style de musique qui est constitué de deux instruments. Le tarawangsa, une vièle à 2 cordes dont l'une est frottée et l'autre pincée et le jentreng, (sorte de kecapi) à 7 cordes pincés. L'instrument tarawangsa serait antérieur à l'arrivée du rebab à java, autre instrument à corde frottée présent dans les ensembles de gamelan.

Lorsque l'on additionne le nombre de cordes des deux instruments (tarawangsa et jentreng), on arrive au nombre de neuf. Ce n'est pas un chiffre anodin, puisqu'il est associé aux Wali Sanga qui dans la tradition javanaise seraient les neuf saints javanais qui ont propagés l'islam à Java dès le 14e siècle. Le tarawangsa et le jentreng auraient servis comme vecteurs de diffusion de l'islam. Le mot tarawangsa même est une association de syllabes dont les dernières seraient des abréviations de Wali Sanga.

Ces instruments de musique servent principalement comme musique de rituel pour célébrer la fin des récoltes et inviter ainsi la déesse du riz, Dewi Sri. Les nombreux villageois participent en dansant spontanément. La danse ne suit pas une chorégraphie pré-établie elle n'est pas destinée au regard des humains mais plutôt aux esprits. Il n'est pas étonnant que la transe fasse son apparition au cours du rituel. Parmi les quarante-deux pièces du répertoire de tarawangsa, seul sept d'entres elles sont utilisées pour la danse.

répertoire du tarawangsa

Aujourd'hui, le contexte de jeu lié aux récoltes existent encore mais il s'y ajoutent des situations de performances plus profanes comme par exemple des mariages, des naissances ou des festivals de musiques traditionnelles.

Au contraire d'autres musiciens de Tarawangsa, Pupung Supena se revendique comme un authentique musicien de cette tradition, dernier descendant d'une longue lignée venant de Rancakalong et vivant encore dans ce district. La musique de Tarawangsa se transmet oralement sans utilisation de notation. Selon Pupung Supena, il faut environ un an de pratique intensive, en fonction de la rapidité d'apprentissage de l'élève, pour apprendre la totalité du répertoire.

Merci encore à Teteh Wiwid et nos deux Kang Asep sans qui nous n'aurions pas pu rencontrer aussi rapidement ces deux musiciens exceptionnels dans cette région périphérique de Bandung.

(A suivre) le gamelan Selap chez Putra Giri Harja 3